Le 11ème forum AquiDoc s’est ouvert par une conférence-débat sur la valorisation du doctorat pour l’insertion professionnelle. Des conseils, des aiguillages, des acteurs-clefs à connaître, des outils à utiliser, voici l’essentiel à retenir !
Une bonne insertion hors du secteur académique, cela se prépare aussi pendant le doctorat. Les premiers mots ont ainsi été confiés à M. Roger Marthan, directeur du Collège des Ecoles Doctorales dont il a rappelé les missions : améliorer la visibilité du doctorat au niveau de l’université, valoriser l’attractivité du doctorat, également pour les poursuites de carrière hors du secteur académique, proposer des formations de qualité et favoriser l’internationalisation du cursus ainsi que la vie étudiante. Mme. Stéphanie Danaux, chargée des relations avec les associations au sein du Collège, a ensuite expliqué l’aide qu’elle pouvait apporter aux associations de doctorants : leur donner plus de visibilité, en diffusant par exemple leurs annonces, les accompagner lors du montage de projets et leur proposer un soutien financier.
M. Philippe Goyer, adjoint au Maire de Talence, a mis en avant le service municipal de l’emploi de la commune et les possibilités qu’il offre notamment pour établir son réseau, essentiel pour décrocher des emplois à haute valeur ajoutée. Les groupements locaux, tels que Talence Innovation ou le Groupement des Entrepreneurs Talençais, et des services comme le pôle de développement économique de la Métropole, peuvent être de précieux alliés lors de la recherche d’emploi, depuis la connaissance des tendances économiques jusqu’à l’établissement de contacts. Pour terminer, il a rappelé qu’un doctorant ou un docteur cherchant sa voie ne devait pas hésiter à contacter directement ses élus, qui restent très disponibles.
Suite à ces premières interventions, M. Mathieu Rouault (Doctéo), animateur de la conférence-débat, est entré dans le vif du sujet en rappelant les chiffres de l’étude CEREQ de 2017, concernant l’emploi des docteurs diplômés en 2010 après 5 ans :
– 31% d’entre eux ont un emploi à durée indéterminée dans la recherche publique
– 11% ont un emploi à durée déterminée dans la recherche publique
– 12% ont un emploi dans le secteur public hors recherche
– 19% ont un emploi dans la R&D privée
– 18% ont un emploi dans le secteur privé hors recherche
– 9% sont en situation de non-emploi.
Que retenir de ces chiffres ? Une évolution. Entre 2010 et 2015, l’emploi en R&D privée est passé de 13% à 19%. L’engouement des entreprises pour les docteurs est donc visible et le privé constitue un débouché à ne pas négliger. C’est dans ce sens que nos quatre invités, M. Florian Andrianazy (PhD Talent), Mme. Clémence Chardon, (Adoc Talent Management), Mme. Marie-José Laisne (APEC Bordeaux) et M. Mathias Robine (enseignant-chercheur et PDG de Simbals) ont exposé les stratégies du docteur pour valoriser son diplôme.
Nos invités, au contact des entreprises, constatent eux aussi l’engouement progressif de ces dernières pour le bac+8. Ainsi la Career Fair proposée par PhD Talent a multiplié par trois le nombre de ses exposants et par quatre le nombre de ses visiteurs depuis 2014. Toutefois certains préjugés réciproques sont tenaces : d’un côté certaines entreprises qui pensent que les docteurs ne savent faire que de la recherche, et d’un autre certains docteurs pour qui se projeter dans une entreprise reste plus ou moins difficile selon les secteurs. La grande taille de l’entreprise n’est pas un indice sûr de sa connaissance du monde doctoral. Les start-ups apprécient en revanche globalement les docteurs en tant que vecteurs d’innovation. L’encadrant du doctorant est un bon ambassadeur auprès de ces petites structures, et souvent le point d’entrée dans un réseau.
Le premier point est donc d’identifier les mécaniques d’offre et de demande suivant les domaines. Ensuite, il s’agit de bien défendre son doctorat face à l’employeur et, pour cela, de ne pas oublier une partie des compétences qui l’accompagnent. Car si beaucoup pensent à mettre en avant les techniques qu’ils ont maîtrisées et l’expertise qu’ils ont d’un sujet ou d’un domaine, les entreprises ne recrutent pas que des spécialistes, et sont sensibles aux « soft skills » des candidats. Celles-ci sont nombreuses chez un docteur ! Gérer un projet sur trois ans, planifier, savoir faire une analyse de l’existant et établir une veille, analyser un problème complexe et proposer des solutions à celui-ci, communiquer ses résultats, établir des partenariats, rechercher des financements, travailler en équipe et identifier les personnes à contacter, organiser des événements… Ce sont ces compétences transverses, nécessaires au quotidien dans l’entreprise, qui font qu’un docteur inséré dans le privé peut commencer en tant que chef d’équipe et passer très rapidement cadre senior. Prendre conscience qu’il s’agit bien de compétences, bien que les mettre en œuvre soit parfois routinier, est la première étape à franchir.
Pour vous aider, nos intervenants vous invitent à reconsidérer chaque étape de la thèse et à vous demander : « Quelle compétence ai-je utilisée à ce moment-là ? ». L’APEC propose également, en partenariat avec Deloitte Conseil, une synthèse des compétences attendues dans les métiers de la recherche à l’horizon 2020 afin de vous aider à les identifier, à les nommer, et à établir ainsi votre bilan de compétences. Des outils (DocPro par exemple) sont également disponibles sur Internet. Une fois ce bilan fait, il faut les traduire sur vos CV et vos lettres de motivation, puis les mettre en avant lors des entretiens, en sélectionnant les plus appropriées à l’entreprise et au poste visés. N’hésitez pas, même pour les plus évidentes : le recruteur a besoin de savoir que vous en êtes conscient. Différents acteurs peuvent vous y aider : le Collège des Ecoles Doctorales, Adoc Talent Management, ainsi que l’APEC, service public gratuit, accessible aux doctorants et docteurs, qui propose un accompagnement personnalisé et complet depuis la connaissance de l’environnement économique, le développement de la réflexion par rapport à l’emploi, jusqu’à l’identification des compétences acquises et bien sûr in fine la rédaction de CV et de lettres de motivation.
Les recruteurs du secteur privé sont également attentifs à toute expérience hors académique, qu’il est indispensable de mettre en avant. Mettre un pied dans le privé pendant son doctorat ? Le dispositif « mission doctorant-conseil », encore trop peu connu, permet d’effectuer une mission en entreprise dans le cadre des activités complémentaires au doctorat. Si le thème peut être proche de celui de la thèse, permettant ainsi de développer un aspect particulier de celui-ci, cela peut aussi être l’occasion de développer de nouvelles compétences : formation de personnel, valorisation de la recherche, etc. Ou même de venir à la rencontre de l’entreprise, de découvrir son fonctionnement, voire de créer son réseau. Pour trouver ces missions, les doctorants sont invités à prendre contact avec le Collège des Ecoles Doctorales.
Enfin, un atout caché du docteur est le dispositif « Jeune docteur », ou Crédit d’Impôt Recherche. Pendant les deux premières années de son CDI, un docteur peut rapporter de l’argent à son entreprise grâce aux retours fiscaux. Un argument non négligeable à glisser en fin d’entretien pour achever de convaincre.
Une fois conscient de son potentiel et ses arguments préparés, le docteur « n’a plus qu’à » contacter les entreprises qui l’intéressent. Mais comment faire, pratiquement ? Tous les moyens sont bons, répondent nos intervenants. Le premier réseau passe inévitablement par la famille. Mais il faut savoir l’enrichir. Les conférences peuvent être des occasions de rencontres avec les entreprises de son domaine. Les forums et les salons comme celui proposé par AquiDoc doivent être utilisés efficacement : prenez les cartes de visite et recontactez les personnes avec lesquelles vous avez discuté. E-mail, téléphone, n’ayez pas peur d’insister un peu, le premier mail reçoit rarement une réponse… Les réseaux sociaux ne doivent pas être négligés non plus, veillez à garder un profil à jour ! Intéressez-vous au parcours des personnes que vous contactez, posez-leur des questions. Il n’existe pas de « tactique » pour prendre contact, si ce n’est d’être curieux et ouvert. N’oubliez pas votre réseau « scientifique » établi lors de la thèse. Vos encadrants ou les anciens étudiants du laboratoire ont déjà tissé leur propre réseau et pourront vous ouvrir leur carnet d’adresses. Enfin, certains organismes déjà cités peuvent vous aider à prendre des contacts.
Avant de conclure, la question du post-doctorat est soulevée. Oui, le post-doctorat constitue une expérience professionnelle, tout comme le doctorat. A ce titre, il est valorisable auprès d’un recruteur. Le candidat doit toutefois savoir parler la langue du secteur privé et trouver un vocabulaire concret qui souligne ses accomplissements. Un post-doc est ainsi un « projet de recherche » ou une « mission ». Et si vous hésitez entre la poursuite de carrière académique et non-académique, pourquoi ne pas tenter un post-doctorat en lien avec une entreprise ? La transition en sera facilitée.
Quelques conseils pour terminer !
Soyez fier de votre parcours ! Le doctorat est la preuve d’un savoir et d’un savoir-faire uniques, qui font de vous l’expert mondial de votre domaine.
Soyez curieux de l’entreprise ! Si vous hésitez, n’attendez pas le dernier moment pour rencontrer des gens, discuter, vous créer des opportunités.
Intéressez-vous aux besoins des entreprises ! Essayez de vous placer de leur point de vue et de comprendre leurs attentes. Que pouvez-vous et voulez-vous leur proposer ?
Travaillez votre réseau ! Une entreprise n’embauche que très rarement un « inconnu ». Appuyez-vous sur les ressources mises à votre disposition par les organismes d’aide à l’emploi des docteurs pour connaître et vous faire connaître.